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Malformation d’Arnold Chiari: Les failles du système de santé français

La malformation d’Arnold Chiari est caractérisée par une descente anormale du cervelet au niveau de la nuque et des vertèbres cervicales. Elle provoque de nombreux symptômes dont de violents maux de tête, des vertiges, des nausées, des faiblesses musculaires, des engourdissements, et des troubles neurologiques allant jusqu’à d’importantes paralysies des membres.

Il existe deux types de Chiari reconnus officiellement par la France (type 1 et 2). Alors que certains pays en reconnaissent pas moins de sept, la France fait office de mauvais élève tant en terme de diagnostic que de prise en charge. Les médecins se voient contraints de suivre le PNDS (Protocole National De Soins) actuellement en vigueur, sorte de mode d’emploi à suivre devant une suspicion d’Arnold Chiari.

Seulement voilà, le PNDS français a été modifié récemment, remaniant totalement les critères diagnostics en place, qui étaient déjà largement insuffisants. Les nouveaux critères s’avèrent être beaucoup trop stricts, diminuant considérablement le nombre de patients pouvant être diagnostiqués. Et ils sont à l’opposé de ceux en vigueur dans de nombreux autres pays, pourtant beaucoup plus compétents que la France concernant le Chiari.

Résultats: de nombreux patients, pourtant clairement porteurs de la malformation, se voient refuser d’être diagnostiqués. On leur assure qu’ils ne sont pas atteints par la maladie mais seulement d’une variante anatomique asymptomatique ou FAUX CHIARI, terme très à la mode en ce moment et tout droit sorti de l’imagination des médecins. Leurs symptômes sont alors associés par les neurochirurgiens à une cause psychologique. Il faut bien comprendre que ces mêmes patients auraient eu leur diagnostic posé sans l’ombre d’un doute s’ils avaient consultés les mêmes neurochirurgiens il y a seulement 2 ans.

Alors pourquoi ces modifications? Le sujet est complexe mais je vais tenter de le simplifier.

Il n’existe que deux chirurgies possibles dans le traitement du Chiari:

  • La Craniectomie qui consiste à soulager la pression intracrânienne en retirant les os de la nuque (volet crânien occipital), et une partie des deux premières vertèbres cervicales. Elle n’est indiquée que lorsque le liquide céphalo rachidien (LCR) ne circule plus, et donc uniquement pour des Chiari déjà très développés. A ce stade, les symptômes sont extrêmement handicapants. C’est une chirurgie très lourde, et invasive dont la convalescence se compte en mois. Les risques sont énormes (paralysies, lésions nerveuses irréversibles, fuite de lcr, infections, risques l’anesthésie générale, etc..). C’est également la SEULE chirurgie proposée par la France.

 

  • La Section du Filum terminal, consiste à supprimer la cause du Chiari à savoir une moelle attachée basse. Les études de plusieurs pays (Espagne, Italie, Etats-Unis, Canada et Japon) démontrent que dans la grande majorité des cas, la descente du cervelet est provoquée par une traction de la moelle épinière vers le bas. La faute au filum terminal, une sorte de corde qui court de la nuque jusqu’au sacrum. Il est sensé être souple et fin. Mais dans le cas de la moelle attachée basse, le filum est trop épais, et trop tendu. Sa tension est telle que l’ensemble de la colonne vertébrale y est soumise entrainant des scolioses, des syringomyélies (poches de lcr dans la moelle épinière) et une descente du cervelet donc un Arnold Chiari. Une simple section de ce filum permet de libérer la moelle, de soulager les scolioses et de stopper définitivement la descente du cervelet. C’est une chirurgie mini-invasive, en anesthésie locale, qui consiste à effectuer une incision de 4 cm au niveau du sacrum. Les suites opératoires sont simples, les risques anesthésiques sont très faibles, et les risques complications (paralysies) quasiment inexistants.

Seulement voilà, la France ne reconnait ni la moelle attachée basse comme étant responsable du Chiari, ni la section du filum terminal comme chirurgie permettant d’en stopper l’évolution. J’ai donc cherché à comprendre pourquoi. Et ayant subit personnellement les deux chirurgies, en commençant par la craniectomie, à 16 ans d’écart, je suis bien placée pour saisir les tenants et les aboutissants de cette situation.

Le PNDS a été modifié à la demande de l’équipe médicale référente du Chiari en France. Ces neurochirurgiens sont à la tête du centre de référence national. Ils sont donc sensés être extrêmement compétents en la matière. Pourtant, ils ne voient que par la craniectomie (leur spécialité), niant les résultats des études de leurs confrères étrangers. J’ai personnellement eu affaire à eux avant de subir ma section du filum terminal en Italie (qui m’a rendu l’usage de ma jambe gauche, paralysée pendant 3 ans). J’ai froidement été reçue par un éminant professeur, qui m’a dit qu’il ne pouvait rien faire pour moi (vu que j’avais déjà subit une craniectomie des années auparavant),  et que je finirais inéluctablement par perdre l’usage de mes deux jambes. Il m’a aussi dit que j’avais plus de chances de retrouver l’usage de ma jambe en allant prier à Lourdes qu’en subissant une section du filum. Force est de constaté qu’il avait tort car aujourd’hui je fais de la course à pied. Je précise que j’ai retrouvé la force de ma jambe seulement 4h après la chirurgie.

On peut donc légitimement pensé que, si demain la France se rend compte qu’une chirurgie mini-invasive, à la portée de n’importe quel neurochirurgien car très peu technique, et coûtant moins cher à la sécurité sociale, est plus indiquée qu’une craniectomie, ce centre de référence perdra toute crédibilité, ainsi que ses financements. Une question d’égo et d’argent finalement.

Mais alors, pour en revenir au PNDS, pourquoi durcir les critères de diagnostic? En décidant de ne diagnostiquer que les Chiari éligibles à la craniectomie (les plus graves), ces neurochirurgiens diminuent les risques qu’ils prennent. Pas pour le patient, mais pour leur carrière. En effet, un patient présentant déjà des symptômes très handicapants avant la craniectomie, risque de les conserver après celle-ci. Mais en aucun cas ils ne pourront être attribués à la chirurgie. Et celle-ci sera forcément considérée comme une réussite en rétablissant une circulation correcte du lcr.

Alors qu’un patient avec un Chiari léger, ne sera donc pas diagnostiqué car ces médecins n’ont actuellement aucune solution à leur proposer. La craniectomie n’étant pas indiquée dans leur cas, cela permet de modifier artificiellement les statistiques des taux de prise en charge chirurgicale et des taux de réussite de cette chirurgie. Car on sait  qu’une craniectomie sur ces patients fera plus de mal que de bien et entrainera de nouveaux symptômes. Une catastrophe pour les neurochirurgiens, alors ils les retirent tout simplement de l’équation.

Voici un exemple pour mieux comprendre:

Avant la modification du PNDS, sur 100 patients diagnostiqués Chiari, 10 auront besoin d’une craniectomie. Le taux de prise en charge chirurgicale est alors de 10%. 90% des patients se retrouvaient sans solution de la part des neurochirurgiens.

Actuellement, sur 100 patients, seulement 10 seront diagnostiqués. Les 90 patients restants sont renvoyés chez eux, avec un diagnostic de variante anatomique asymptomatique (on leur dit qu’ils n’ont rien et que leurs symptômes sont psychologiques). Les 10 patients diagnostiqués subiront une craniectomie. Le taux de pris en charge chirurgicale est alors de 100% avec un taux de réussite de 100% également.

Tout va bien dans le meilleur des mondes.

Pendant ce temps, les patients laissés sur le carreau se démènent pour pouvoir accéder à une section du filum terminal à l’étranger, qu’ils devront financer eux-mêmes (entre 11000€ et 23000€ selon les pays). Mais qui sera leur seule possibilité d’espérer une amélioration de leur état de santé.

Pour dénoncer ce système, et aider les patients, j’ai écrit le livre “Arnold et Moi, Vivre avec des douleurs chroniques” disponibles aux éditions du net.

Disponible ici: https://www.leseditionsdunet.com/livre/arnold-et-moi

Arnold et Moi, Vivre avec des douleurs chroniques. Auteur: Mona

 

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